Entre deux averses

Courir pour cueillir entre deux averses,
Scruter le ciel et la météo,
Apprécier tout de même de n'avoir toujours pas commencé d'arroser quoi que se soit, au mois de juin, en Provence.

     Je vois à peine le bout des cueillettes de printemps. Bourgeons de pin, thym, coucou, aubépine, coquelicot, ronce, framboisier, sureau, frêne, je vais, je viens ici et là. Cette année, les cueillettes sont intenses. Beaucoup de plantes ont démarré en même temps, et il pleut beaucoup. La pression est à son maximum pour réussir à trouver toutes les plantes. Je me retrouve à devoir chercher de nouveaux lieux de cueillettes plus haut en altitude pour trouver celles que je n'ai pas eu le temps de cueillir plus bas.
Les pins sylvestres ont démarré tard cette année, et sur mon lieu de cueillette habituel les arbres avaient tellement souffert de la sécheresse que les bourgeons étaient minuscules. Après plusieurs jours de recherche, j'ai fini par trouver une magnifique jeune pinède aux bourgeons nombreux, vigoureux et plein de résines.  Plus de vingt kilos de bourgeons frais c'est ce qu'il me fallait ramasser pour obtenir 12 kilos de bourgeons secs. Bien contente d'en avoir terminé!
La récolte des bourgeons de pin est un long et minutieux travail. Ici, on voit bien le bon stade de récolte. A gauche les bourgeons ont commencé s'allonger mais sont encore bien fermés et font moins de 2,5cm. A droite, c'est trop tard, les bourgeons s'épanouissent pour libérer leur pollen.
Parfois on y croit plus, et c'est à ce moment là qu'on trouve ce qu'on cherche, et parfois même ce que l'on ne cherchait pas.
C'est ce que je me suis dit en travaillant avec cette vue sur le lac de Sainte Croix.
   Malgré les aléas de la météo et des saisons, je suis quand même très contente cette année. Je me sens à l'aise. Pour la première fois peut-être j'ai en tête le déroulé de ma saison et je suis sereine. 

L'année dernière, au 20 avril les prairies de ce même lieu étaient jaunes de coucou. Cette année, au 10 mai, il n'y avait presque rien encore. Malgré tout retrouver la montagne est toujours une grande joie. Et puisque les coucous sont encore fleuris en juin, c'est bientôt le moment d'y retourner!
    Malgré tout, il y a beaucoup de travail, et la fatigue accumulée de ces dernières années se fait sentir.
   En plein mois de mai, mon épaule gauche me lâche victime d'une mauvaise tendinite. Impossible de lever le bras ni de faire le moindre mouvement. Si je reprend peu à peu le travail malgré tout, je remercie de tout cœur toutes celles et ceux qui ont été présent-e-s pour me soutenir dans ce moment difficile.

 Souvent, les personnes que je rencontre ont une vision qui relève du fantasme de ce que peut être le métier de producteur-cueilleur de plante. Malgré tout l'amour que j'ai pour mon métier, il n'en reste que c'est un travail très physique avec de nombreux gestes répétitifs et des positions souvent inconfortables, surtout en cueillette.

La cueillette des fleurs à commencé et les claies du séchoir se colorent : roses, mauves, coquelicots. Je suis très fière d'avoir explosé mon record de coquelicots cette année : 3kg secs!!! Autant dire des heures, et des heures de cueillette ( la seule chose que je pouvais faire avec cette foutue tendinite! )
   Maintenant que les cueillettes de printemps se terminent tranquillement avec le tilleul, il est temps de reprendre en main les jardins! Désherbage, beaucoup de désherbage (merci la pluie!), débroussaillage, paillage, dernières plantations. Et puis les premières coupes pour les mélisses, les menthes, et bientôt la verveine.

Aline en stage à la ferme m'aide à pailler les verveines. En haut à droite : les différents bourgeons en cours de macération. En bas à droite : jour de pluie-jour de tri. Après avoir séché les bourgeons de pin, je les passe au tamis avant de finir à la main afin d'enlever les aiguilles.
La mélisse commençait à avoir une maladie fongique. Une bonne pulvérisation à base d'huile essentielle d'origan et de laurier et le problème est réglé. Soigner les plantes par les plantes.
    Les draps chargés de plantes sèches attendant d'être effeuillées ou tronçonnées* s'amoncellent dans l'atelier et occupent les journées pluvieuses.

   Je ne sais pas comment finir ce billet. Peut-être parce qu'il n'y a pas de fin. Peut-être parce que demain le soleil se lèvera, j'accompagnerai mon fils à l'école, puis je rejoindrai les tilleuls en fleurs. Les jours défileront, laissant derrière eux des fleurs fanées et devant des boutons prêts à éclore.



 *entendre coupées en tronçon d'environ 1cm pour l'herboristerie.
Le deuxième séchoir tourne à plein régime, 24h/24. A gauche chargé de mélisse, à droite de menthe marocaine. Et on a pas a pas fini!         Spécial merci à Aline en stage à la ferme qui est devenue une spécialiste en chargement et déchargement de séchoir ;-)

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